Pourquoi je sais qu’Ilzyeute & Tristan est un bon livre.

L’histoire d’Ilzyeute & Tristan commence en 1991. En août, pour être précis, au moment où je prends le train de Metz à Bordeaux, pour aller y faire mes études. Je jette, les larmes aux yeux, sur un carnet, les premières lignes d’une histoire, qui commence par un départ. Il faut que quelque chose sorte : j’ai le cœur brisé de quitter un amour impossible (je me spécialise pas mal dans l’exploration de la friend zone, à l’époque, sans jamais aborder l’île des amis sexuels, d’ailleurs).

Il me faudra trois ans pour arriver à une longue nouvelle, qui servira ce à quoi elle se destinait : témoigner de la profondeur de l’amour que je portais à cette jeune femme. L’offrande d’un tapuscrit masquait aussi, sans nul doute, le secret espoir de ravir enfin le cœur de la demoiselle, qui changerait abruptement de point de vue sur moi en voyant mon génie littéraire ; autrement dit, j’allais la rendre aveugle par ma brillance et aveugle, on peut tomber amoureuse d’un monstre, cf The Toxic Avenger.

The Toxic Avenger et la belle aveugle

Ceci raté, quelques années plus tard, je décide de devenir écrivain. En 1997, très précisément. Après avoir écrit Les Joueurs de Lost Vegas, commencé à développer l’univers de l’e-troubadour marco, je relis Ilzyeute & Tristan… et ma foi, trouve qu’il y a des choses à sauver là-dedans. Je sais bien que c’est interdit les histoires nées de ce ferment-là, que rien de bon n’en sort. Ça tombe bien, j’aime l’interdit. L’univers et le ton me plaisent, reste à transcender l’intention initiale, gommer le larmoiement, revoir le tout à l’aune de la dramaturgie.

Un cycle de ré-écriture s’amorce, qui durera jusqu’à 1999. Je développe les personnages, qui s’éloignent de plus en plus de la décalque initiale d’innocents dont seuls les noms ont été changés, se parant des pelures d’autres personnes et de cohérence narrative. Je travaille le texte au corps, grâce à l’aide d’amis, de bêta-lecteurices. Enfin satisfait, j’envoie le texte à une dizaine de maisons d’édition, plutôt dans la littérature blanche. J’aurai un seul retour, mais tellement réconfortant : celui d’Antoine de Kerversau, des éditions La Baleine, qui confirme que le texte est bon, mais pas pour leur collection Velours d’alors.

À partir de là, d’autres projets m’accaparent et je ne pousse pas plus que ça pour faire publier le livre. Jusqu’à 2005, moment où j’arrête temporairement ma carrière d’écrivain, je n’y toucherai pas, me le gardant sous le coude et dans un fond de tiroir en même temps, en me disant qu’avec encore du travail, la prochaine fois, ça passera.

Avance rapide jusqu’à 2018. Je prends un congé sabbatique de sept mois pour écrire. Je me demande ce que je vais faire dans ce laps de temps somme toute assez court. Je sais que je veux me frotter à la forme interactive : ce sera Picaro, une œuvre pas encore finie (bientôt sur tous les écrans). Parmi tous les manuscrits et projets presque terminés que j’ai déjà commis, je me demande lequel vaudrait le coup de terminer.

Il y a l’ensemble des textes cyberpunk d’e-troubadour marco, Tov, une vie moderne et Ilzyeute & Tristan. Finalement, je clorais ce congé par la publication de Cyberpunk is dead, bébé et aurai terminé l’ultime version d’I&T (cette fois, c’est la bonne, haha). J’aurai rajouté encore quelques péripéties que le récit demandait, et donné de l’épaisseur à Ilzyeute, l’aurai habillée d’une consistance qu’elle n’avait pas jusqu’alors.

J’envoie le texte à une dizaine, encore, de maisons d’édition. Je sais pertinemment que ce n’est pas assez, que pour maximiser les chances de se faire publier, il convient d’arroser tout ce qui s’affiche publiant à compte d’éditeur et dont on connaît plus ou moins la ligne éditoriale. Mais la flemme. Et puis, j’ai toujours en tête l’idée d’une auto-édition, parce que je pense que le livre ne rentre dans aucune des cases marketing de l’édition traditionnelle. D’ailleurs, afin de disposer d’un texte prêt à la publication, je fais corriger le texte par Noëlle Rollet, dont les retours sont précieux.

Bref, je non-reçois des réponses, hormis d’une part, une très gentille lettre de refus de David Meulemans des éditions Aux Forges de Vulcain, qui a aimé le manuscrit ; et d’autre part, je ne sais pas si la réponse du Seuil est standard, toujours est-il qu’à côté de « nous n’avons pas été suffisamment convaincus », mon biais ne voit que « Malgré des qualités indéniables ».

Certains éditeurs ont donc apprécié le texte. Qu’en est-il du lectorat ? Les retours, et, en ce 30 décembre 2022, il n’y en vraiment pas lerche, témoignent eux aussi d’une valeur littéraire originale.

Six avis, dont deux venant de personnes que je ne connais pas. Deux, je trouve ça énorme. Encore une fois, étant donné le nombre de ventes, additionné du peu d’exemplaires donnés (hormis ceux d’auteurs), vu que les envois depuis l’Espagne me coûtent bonbon, le rapport est plutôt très bon.

Alors oui, cela ne fait pas beaucoup. L’excuse de l’auteur maudit serait de dire que le monde n’a pas su reconnaître son génie ; alors qu’en vrai, il suffit de mettre un coup de collier et laisser plus de gens savoir que le livre existe, et qu’il est bon.

Parce que je sais que ce livre est bon. Il valide ce que je considère valoir le coup en littérature : une proposition originale, qui ne laisse pas indifférent. Ça n’arrive pas tous les jours, il semblerait. Pour couronner le tout, « se laisse lire », dixit Maman.

Comme si cela ne suffisait pas, et de toute façon, Ilzyeute & Tristan me plaît. Je ne renie rien du texte, c’est ce que je devais écrire. J’aime bien mes persos et ce qui leur arrive. D’ailleurs, si jamais je dépasse deux cent ventes, je mets en route le tome deux.

Pour le potentiel tome 1, ça se passe ICI.

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A propos Marc Mahé Pestka

Ecrivain, game designer, explorateur de littérature interactive depuis quelques décennies, déjà.

Une réponse à Pourquoi je sais qu’Ilzyeute & Tristan est un bon livre.

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