L’avantage avec les méthodes de gestion de projet agile, c’est qu’un échec n’est jamais vraiment un échec, parce qu’on a appris quelque chose, et que ce delta de savoir incrémental possède une valeur immense. Dédouanage complet, niveau zéro de l’honneur, anti-seppuku total, mais le cerveau apprécie la culpabilité, les regrets, les remords, la honte, la paralysie créative en moins.
C’était quoi le projet ? Magie de l’hypertexte, pas besoin de faire un résumé. Brut, du contenu en plus à absorber.
Je parle donc d’échec. La KPI essentielle ici était le nombre d’œuvres que je voulais publier. Le plan initial était donc de mettre à disposition du public 10 (dix) œuvres en 6 (six) mois. Bilan au bout d’un (1) an : je suis arrivé à la deuxième (IIème) priorité, et il y en a deux autres en passe de voir le jour, sachant « qu’en passe de » dure parfois des années, vu mon historique de publications. Plus besoin de créer pendant quatre (4) ans, auto-éditer les 14 (quatorze) projets que je trouve intéressants devrait mobiliser la totalité de mon activité littéraire.
Sur ce plan, cependant, il y eut des surprises, des moments qui confortent le pas sur le chemin emprunté (voir publications). Sur le plan personnel, mon « jour destiné à écrire » m’a souvent servi à traverser plus sereinement des moments difficiles. J’ai continué à produire presque quotidiennement des poèmes sur Twitter, nourris de la dense masse des choses de la vie. Ces situations, événements, sentiments ont aussi nourri mon imaginaire, qui ne se tarit pas, qui bout en moi, qui me fait écrire sans y penser (ça se sent, je sais, et en fait, je m’en fous) ; et mon expérience de moments intenses que je veux retranscrire d’une façon ou d’une autre.
Alors que publier, c’est une tannée. Je n’y arrive pas, mais alors vraiment pas. La conception du livre Tristan & Ilzyeute a été laborieuse, la promo désastreuse. En toute objectivité. La preuve : pour bien illustrer la chose, je publie ici un brouillon où il ne manquait plus qu’un clic à effectuer. Pas eu envie de le faire, parce que la vérité, c’est que je n’ai pas vraiment progressé sur le terrain de la communication. Je crois que ce jour là, j’ai décidé d’envoyer un bon vieux mail à mes contacts (des genX, souvent, ça a connu le mail, effet nostalgie en bonus). Pis, voyant que j’avais bien travaillé, j’ai trouvé ça fort bon et j’ai arrêté juste après. C’est le côté sympa de Jehova, le repos pour l’éternité. Jusqu’à maintenant, où je me décide à fournir un ultime effort, une fantaisie finale.
L’essentiel de mes projets, comme on vient de le voir, consiste en la publication d’anciens textes. Je voulais m’en débarrasser pour avancer serein, ce ne sera pas aussi facile que prévu.
D’autre part, du côté du jeu-vidéo, ça se passe plutôt très bien. Je travaille en ce moment sur un projet auquel ma présence à temps plein apporterait quelque chose.
Bref, finis les mercredis. Ils reviendront, sous une autre forme, comme à chaque fois. Je suis tenace, pire qu’un pou VRP. Si ça passe pas par ici, devine ce qui va se passer par là ?
Car je suis déjà gros des enseignements tirés. Normalement, c’est la partie juteuse des post mortem, celle à laquelle il fallait sauter tout de suite, pour se la jouer « trop long ; lu à moitié », efficace, certes, mais empathique.
Quelles sont-elles donc ces perles de sagesse ?
Ce qui me plaît dans l’auto-édition, c’est le côté auto. L’édition, je comprends, je vois ce qu’il faut faire, j’ai fait même par le passé, mais franchement, passer du temps à promouvoir ce que je crée me bouffe la création.
J’ai eu cinquante-quatre (110110) jours pour éditer et créer, j’en ai utilisé un tiers (0,33333) pour autre chose que des activités littéraires, et ce qui restait concernait essentiellement du travail d’édition, même si celui-ci implique forcément de la réécriture. Cependant, je n’ai qu’une envie : écrire. Il n’y que là que je suis bien. L’auto-édition m’a infligé deux trois traumas déjà, je ne vois pas d’intérêt à continuer. Il va falloir que j’envisage d’autres options : publier sans réécrire, tel quel, malgré les défauts qui me brûlent la rétine ; oublier ces vieux projets, malgré leur attrait, et me concentrer sur les œuvres à venir, qui se heurteront donc au même mur, mais plus tard ; revoir ma politique vis-à-vis des maisons d’édition ; arrêter d’écrire un temps ?
Deuxième enseignement : si, pour les jeux vidéo, j’arrive à créer de 10h00 à 19h00, sans sourciller, il n’en est pas de même pour l’écriture pure. La contraindre à une dizaine d’heures le mercredi ne marche pas pour moi. Je préfère, de loin, disposer d’un temps long, durant lequel je peux mettre en place mes rituels de création. J’ai tenté d’écrire avec constance, je préfère le bordel, je crois.
Troisième observation : je n’écris pas de la merde. Déjà, une formidable maison d’édition(s derrière la salle de bain), me laisse une place dans son catalogue. Ensuite, une cinquantaine (32aine) de fidèles (vingt pour cent ─ 1/5 ─ sous la menace du couteau) qui me suivent sur différents canaux, et moi, pensons que ce que je publie a de la valeur. Et ça, alors que tu clos, le cœur quand même, brisé, une parenthèse d’intense joie, cela élève vers le monde des rêves, celui dont je déchoie quand les contingences matérielles me mordent le mollet et qu’il me tarde toujours de retrouver.